CORREDOR VERDE DE CALI
ANALYSES URBAINES
INTENSIONS DU PROJET
Accès à la mobilité – locale et régionale
La structuration initiale du corridor vert de Cali ne passe pas seulement par son caractère écologique, mais aussi par une vision se voulant bonifiée de la mobilité à échelle locale et territoriale. À l’issue d’ateliers d’idéation entre la municipalité de Cali et divers organismes publics et privés, plusieurs enjeux liés à la mobilité ont été soulevés. Entre autres, l’augmentation indéniable du trafic dans le centre-ville de Cali, la faible offre de transport intermunicipal, ainsi qu’un cadre législatif peu investi en termes de mobilité durable (CODATU, 2019). À la suite de ces observations et dans une logique de développement d’une nouvelle autorité régionale de transport, la ville de Cali appuie son projet de restructuration urbaine sur l’intégration d’un réseau de TOD (transit oriented developments), en utilisant la structure existante du chemin de fer «del Pacifico», en place depuis 1915 (figure 1). Le projet global vise donc à doter la ville de Cali d’une gare de train léger à même le chemin de fer en place, permettant non seulement aux différents quartiers actuellement moins desservis d’accéder à un service de transport, mais aussi aux villes voisines de pouvoir se déplacer plus facilement vers les grands pôles d’activités (figure 2), visant la réduction de l’utilisation de la voiture solo.
Figure 1. Chemin de fer de Cali
Image tirée du site internet :
https://caliescribe.com/es/17112018-1407/columnistas/15772-columnistas/el-ferrocarril-del-pacifico
Figure 2. Schéma connexions interrégionales
Verdissement des quartiers – connexion des parcs
L’enjeu principal guidant la requalification de certains lieux en parcs urbains est celui des îlots de chaleur (Figure 3), phénomène majeur observé à Cali. La figure ci-contre nous permet de constater que la plupart des quartiers de la ville sont minéralisés de façon importante, ce qui introduit des balises claires d’une nécessaire intégration de végétalisation à-même l’espace urbanisé. Tel que le démontre la figure 4, une multitude de parcs sont aménagés à-même les îlots résidentiels en bordure de la proposition et des noyaux écologiques plus importants sont aussi introduits à divers endroits.
La connectivité des espaces écologiques proposé permettrait donc non seulement la réduction des îlots de chaleur et d’augmenter le confort des habitants, mais aussi de permette un accès généralisé à des espaces verts pour une plus grande population, dans un contexte urbain ou un déficit d’environ 500 000 arbres est observé selon l’Organisation mondiale de la santé (Espacio Collectivo et OPUS, 2016).
Figure 3. Schéma des îlots de chaleurs
Légende : vert = Zone plus végétalisée / jaune = Zone plus ou moins végétalisée /
orange = Zone minéralisée / bleu = zone critique minéralisée
Source : Google maps et information provenant de : Espacio Collectivo et OPUS. 2016. «Corredor verde de Cali : fichas sistemas estructurantes». [En ligne] Corredor Verde de Cali (Parte 1 de 2) by OPUS Paisaje. Arquitectura. Territorio. – Issuu (Modifié)
Figure 4. Schéma de verdissement
Légende : Vert = espaces végétalisés / limites rouge = délimitation de la zone d’intervention
Reconnexions au paysage naturel
À travers la proposition de corridor écologique, l’emphase est également mise sur l’importance des relations avec l’eau. Le territoire de la ville de Cali est situé dans une cuve bordée de deux côtés par la cordillère des Andes, ce qui souligne l’affluence majeure des eaux de pluie vers la rivière Cauca, créant des inondations importantes à chaque année. De plus, le réseau de canaux actuel est sous-estimé et utilisé à des fins de gestion informelle des déchets par la population, le réduisant à une simple décharge à aire ouverte.
Des canaux de drainage et des digues sont donc implantés dans le projet, afin de contenir la montée des eaux et leur permettre de dévier vers les rivières Cauca et Cali (Figure 5). Dans une optique de conservation des constructions existantes, ces stratégies anthropiques complémentaires à l’intégration d’espaces végétalisés semblent convenir et structurer les espaces redonnés à la population. Cependant, il serait intéressant de se pencher sur les notions de résilience du territoire à la lumière des changements climatiques qui s’opèrent et de tenter de définir si l’usage de digues est une façon pérenne de prévenir les inondations, dans le contexte de la Vallée de Cauca.
Schema canaux
De plus, dans une perspective de reconstruction urbaine, le corridor vert de Cali se penche également sur les reconnexions au territoire ancestral de sa communauté. Les espaces végétalisés qui entourent la vallée sont non seulement riches en biodiversité, nécessaires à la filtration des eaux et abritent la périphérie agricole de la ville, ce qui les rend propice à une intégration directe au réseau écologique espéré. Dans une perspective de liaison avec le paysage naturel, le projet propose de se rattacher à la rivière Cauca, ainsi qu’aux Farallones, ceinture montagneuse de la vallée de Cauca en abondant dans le sens d’une «reterritorialisation» (Magnaghi, 2013) sensible non seulement aux instances symboliques et naturelles du lieu et de la population de la Vallée de Cauca, mais aussi par les nouveaux liens qui peuvent être fondés entre le caractère visuel de certains paysages uniques à la région, le bâti anthropique nécessaire et cher à la ville de Cali et les espaces oubliés qui abritent littéralement cette dernière.
Le développement rapide de Cali depuis les années 1970 semble donc être remis en question par le biais du projet proposé. La prévision des réseaux verts abonde dans le sens du développement durable de la ville et fait face aux enjeux créés par la ville moderne dite « traditionnelle ».
Figure 5. Schéma des canaux
Légende : Lignes pointillées = canaux
Source : Google maps et information provenant de : Espacio Collectivo et OPUS. 2016. «Corredor verde de Cali : fichas sistemas estructurantes». [En ligne] Corredor Verde de Cali (Parte 1 de 2) by OPUS Paisaje. Arquitectura. Territorio. – Issuu (Modifié)
ANALYSE
ANALYSE URBAINE
L’urbanisation de la ville de Cali s’est souvent faite de manière non planifiée. Aujourd’hui, la ville se retrouve avec des nombreux problèmes de congestion, de pollution de l’air, de sécurité routière et il y a un manque d’espace publics et d’infrastructures routières pour gérer les différents flux de la ville de manière efficace. C’est dans cette optique que le projet de corridor vert vient requalifier l’ancienne voie ferroviaire qui traverse la ville du sud au nord de manière à dynamiser les échanges autour de cet axe historique qui fait référence au prospère passé industriel sur lequel la ville s’est développée (Drown, 2016).
La ligne directrice du projet étudié met de l’avant la densification des quartiers en contact avec le corridor vert. Cet objectif vise la création d’un milieu de vie compact qui va permettre d’assurer l’utilisation, la demande et ultimement le financement pour l’implantation du réseau de transport structurant (EMRU,2019). La densification visée dans le projet met de l’avant l’intégration d’habitations sociales afin de répondre à la demande des populations qui habitent présentement le secteur d’influence du projet.
En complément à l’objectif de densification, l’implantation d’un réseau de transport structurant est un point clé pour la viabilité du projet. En effet, lorsqu’il est question des connexions régionales, le réseau de transport en commun structurant deviendra la colonne vertébrale du territoire métropolitain de la ville. En tenant compte d’un réseau qui se déploie sur une échelle territoriale, le train léger va avoir une influence sur une population de 3,5 millions de personnes. À l’aide de cette nouvelle infrastructure de transport, le projet de corridor vert va permettre l’implantation d’un système de développement urbain qui joint les objectifs du TOD (transit oriented development), c’est-à-dire un développement stratégique du territoire en créant des secteurs de densité articulés entre eux sur tout le territoire à l’aide du réseau de transport en commun.
La prémisse du projet devient donc la densification et la mixité d’usages tout au long du projet de manière à augmenter l’habitabilité de la ville et créer une ville compacte. L’idée de ville compacte se consolide à l’aide de trois éléments :
La création d’espace public attrayant et identitaire
La proximité avec le transport en commun
Création de milieux propices à la densification (TOD)
Ultimement le projet met de l’avant la création d’un espace public de qualité, en retissant des liens avec les milieux écologiques et en priorisant les piétons, les moyens de transports actifs et le transport en commun au profit de l’utilisation de la voiture individuelle (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).
Lignes directrices du projet
Implanté à la base d’une vallée fertile entre la montagne et la rivière Cauca, la ville de Cali a souffert d’un développement rapide et non planifié qui empêche maintenant les relations sociales, écologiques et urbaines de la ville. Le corridor vert est donc une opportunité pour mettre de l’avant un modèle de ville exemplaire en Amérique latine. Un modèle qui mise sur l’articulation symbiotique des différents systèmes urbains avec les systèmes naturels du territoire où elle s’implante (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).. Ce modèle se veut une tentative de créer un milieu de vie qui améliore la qualité de vie des citoyens, dans une ville qui souffre de nombreux problèmes de santé publique. C’est un projet qui vise un retour des valeurs écologiques et paysagères qui ont caractérisé le développement de la ville depuis sa fondation.
Dans cet ordre d’idée, la restructuration des secteurs d’influences au corridor vert vont permettre de (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d) :
Composer un réseau écologique urbain qui va permettre de joindre les montagnes et la rivière.
Équilibrer la connectivité avec un corridor de transport public structurant.
Intégrer des aspects sociaux et spatiaux dans la ville.
Rénover la ville à l’aide de plusieurs projets de restructuration permettant d’enclencher des processus de transformation urbains.
Équilibrer la connectivité avec un corridor de transport public structurant
La continuité spatiale du corridor vert est un élément fondamental au projet. Pour pallier aux problèmes de connectivité de part d’autre de la ville, la proposition cherche à harmoniser les différents flux à l’échelle de la ville, de manière à créer une ligne pivot dans le territoire permettant de gérer les connexions et les échanges dans la ville.
Pour améliorer l’habitabilité dans la ville et la perméabilité le long du corridor vert, la proposition intègre un train léger qui utiliserait le tracé existant de l’ancienne voie ferroviaire qui est aujourd’hui inutilisée. L’implantation d’un réseau de transport public structurant est un élément primordial qui va permettre la restructuration harmonieuse et souhaitée des différents flux dans la ville. De plus, c’est une opportunité pour créer des nouvelles connexions et améliorer les échanges de part et d’autre du projet et ainsi relier les différents pôles. Afin d’équilibrer la connectivité dans la ville le projet vise à :
Harmoniser les flux dans la ville à l’aide de nouvelles infrastructures qui vont permettre des gérer les échanges entre le milieu naturel et le milieu urbain dans la ville. Le projet cherche donc à créer un milieu de vie où la faune, l’eau, les piétons, les véhicules et les différents réseaux de transport public doivent cohabiter de manière harmonieuse.
Améliorer l’offre en transport public en intégrant un réseau de train-léger, qui en articulation avec les autres modes de transport en commun vont permettre de se déplacer librement et avec facilité à travers le territoire métropolitain. Le projet est donc une opportunité pour mettre de l’avant un modèle de ville qui priorise les modes de transports en commun et alternatifs au profit de la voiture.
Créer des installations à échelle humaine en visant un développement harmonieux du paysage urbain de manière à créer un projet avec des qualités spatiales et urbaines riches, accessibles et qui permettent la continuité des corridors écologiques mis en place, le tout en permettant l’édification d’un système de transport efficace.
Intégrer des aspects sociaux et spatiaux dans la ville
Présentement, l’ancienne voie ferroviaire génère des discontinuités majeures entre l’est et l’ouest de la ville. Ces discontinuités contribuent à la ségrégation spatiale, sociale et écologique dans la ville de Cali. Pour essayer de réparer la séparation actuelle, le projet de corridor vert cherche à :
Intégrer des équipements communautaires qui vont permettre d’enrichir le tissu urbain et la variété dans l’offre des activités le long du corridor. Ces équipements peuvent éventuellement devenir des pôles d’échange entre les secteurs qui se retrouvent aujourd’hui ségrégués.
Améliorer l’offre et la qualité des logements en densifiant dans les quartiers limitrophes au corridor vert de manière à répondre aux besoins des populations qui y habitent présentement et qui sont marginalisés à cause du milieu dans lequel ils habitent.
Conserver, transformer et générer des pôles d’emploi en conservant les industries existantes dans certaines parties du projet et en visant la transformation des industries qui nuisent au développement durable de la ville. Ces interventions vont permettre d’améliorer l’offre d’emplois et de services dans la zone du corridor vert où se situent une partie de la population la plus vulnérable de la ville.
Renforcer et créer les pôles éducatifs et culturels dans le but de tirer profit au maximum des installations déjà présentes dans la ville. Le projet vise aussi l’intégration de bâtiments patrimoniaux aux différentes institutions dans le but de promouvoir la réutilisation de l’héritage architecturale de la ville et encourager par le fait même l’innovation en architecture.
Requalifier les bâtiments patrimoniaux existants liés à l’histoire ferroviaire et industrielle de la ville en les intégrants au projet comme des équipements culturels, communautaires et de service.
Rénover la ville à l’aide de plusieurs projets de restructuration permettant d’enclencher des processus de transformation urbains
En association avec le nouveau réseau de transport de la ville de Cali, le corridor vert permet de créer un grand potentiel pour l’amélioration de l’espace public de la ville. Grâce à divers projets de densification, des nouveaux équipements et services, le projet amène des possibilités de transformation et de restructuration de la ville permettant de créer et renforcer les différentes centralités dans la ville.
Tel qu’illustré dans la carte, le projet vise l’incorporation d’une mixité d’usages à l’échelle de la ville. Cette mixité vise la création d’un environnement urbain varié, qui offre à l’usager des milieux de vie permettant une variété d’activités qui animent l’espace public à toute heure de la journée. De plus, lié au nouveau réseau de transport de la ville, les différentes activités seront facilement accessibles et ce même si elles sont éparpillées dans toute la ville.
Finalement, c’est à l’aide de la restructuration des quartiers limitrophes, de l’insertion de projets exceptionnels et en hiérarchisant les différentes centralités dans la ville que le projet du corridor vert va tenter d’enclencher des processus de rénovation urbaine qui vont complètement changer l’image de la ville.
LES SECTEURS D'INFLUENCES
Le corridor vert de Cali est une proposition de rénovation urbaine qui s’étend dans le territoire de la ville sur une longueur de 22km. Tenant compte le facteur d’échelle du projet, il est important que ce dernier ne soit pas traité comme un grand projet, mais plutôt comme l’unification de plusieurs petits projets qui répondraient de manière spécifique aux besoins soulevés par leur contexte immédiat de manière à enclencher des processus de dynamisation de l’espace urbain cohérents avec leurs milieux (EMRU,2019).
Le projet est donc divisé en sept secteurs de développement qui visent à s’attaquer à des enjeux différents.
SECTEUR 1
Parc linéaire nord
Secteur permettant la requalification urbaine en implantant du commerce au niveau de la rue et des habitations et/ou bureaux aux étages supérieurs. Ce secteur est en connexion directe avec le quartier de Chipi-chape et permettrait l’expansion du noyau écologique de Menga qui permet de relier les montagnes et la ville. Dans son échelle territoriale, cette partie du projet permettrait de relier le centre-ville avec la ville de Yumbo (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).
SECTEUR 2
Parc central
Consolidation du centre-ville avec des constructions en hauteur pour combler les besoins du secteur d’affaires de la ville. Intégration de la rivière Cali et des équipements communautaires existants dans le but de créer un parc urbain sensible à l’histoire de la ville (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).
SECTEUR 3
Promenade urbaine
Le défi de ce secteur est de relier les quartiers de l’ouest et de l’est de la ville qui se retrouvent actuellement séparés par l’infrastructure existante. Le but est d’intégrer des équipements culturels et communautaires, ainsi que le développement de secteurs récréatifs. Ces nouvelles infrastructures viseront la création de nouvelles opportunités d’échange entre les deux secteurs et permettront le développement d’un sentiment d’appartenance envers la ville (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).
SECTEUR 4
Parc linéaire sud
Cette partie de la ville se retrouve actuellement divisée par plusieurs voies de circulation rapide. Le projet vise l’intégration physique, social et écologique des deux secteurs de chaque côté des voies de circulation.
En intégrant le tissu urbain au projet de restructuration urbaine, la proposition vise l’intégration des nouvelles constructions en hauteur dans le but de densifier le secteur, le tout en intégrant des grands espaces verts permettant de créer un noyau écologique qui permettra de connecter les rivières Lily, Melendez, y Canavelarejo. Ce secteur visera l’intégration de nouvelles infrastructures permettant de mieux gérer les différents flux, soit les voitures, le transport en commun, les piétons et les cyclistes, mais aussi les flux d’eau et de la faune (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).
SECTEUR 5
Secteur éducatif
Dans ce secteur, le but est de conserver la continuité écologique existante entre les montagnes et la rivière Cauca. À l’aide d’un bâti de plus petite échelle, la proposition vise la mise en valeur des connexions existantes et la structuration future du secteur. Ce secteur vise aussi l’intégration des équipements et institutions existantes dans le but de créer une cité universitaire dans la ville (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).
SECTEUR 6
Secteur de l’innovation et de la production propre
Dans ce secteur, la proposition met de l’avant la transition d’un pôle industriel vers un pôle d’innovation et de production durable. Ce secteur, en continuité avec le parc métropolitain Marco Fidel Saurez, permet de créer une continuité écologique avec la rivière Cauca (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).
SECTEUR 7
Secteur de la rive
Ce secteur vise la restructuration du bord fluvial dans le but de redéfinir la relation de la ville à la rivière. C’est un secteur qui relie une usine de traitement des eaux grises avec le reste de la ville, le but de la proposition est donc de créer un espace publique éducatif dans le but de sensibiliser la population à la gestion des eaux grises en milieu urbain. Finalement, un parcours d’interprétation du paysage est prévu sur le bord de la rivière Cauca, dans le but de retrouver les liens perdus avec le cours d’eau (ESPACIO COLECTIVO + OPUS,s.d).